« Prom’nons nous dans les bois… »
P. Baynaud
Le Magazine du Chien de Chasse N°31
« Prom’nons nous dans les bois pendant qu’ils n’y sont pas. Prom’nons nous dans les bois… ». Une jeune bécasse en chaperon roux chante. Dans ces bois, elle chemine, frivole et insouciante, sûre qu’aucun chasseur ne les hante. Depuis plusieurs semaines, ni bipède ni chien à affoler, pas une ruse à leur jouer ni cœur à emballer.
En toute tranquillité elle a pu migrer et sans contrariété traverser l’Europe sans être inquiétée. De cet état de fait, elle s’était interrogée. Elle est arrivée ici il y a bientôt un mois et, depuis pas une campane n’est venue la déranger. Elle dit à qui veut bien l’entendre que les chasseurs ont disparu, de même que les ramasseurs de coprins chevelus. Mais attention, cette bécasse n’est pas la première venue. Elle n’est pas n’importe laquelle ! C’est Bécassio. Bécassio, ainsi nommé par ses congénères pour ses traîtres mots, se voit, d’un bec aux mesures réduites, pourvu. Il est inversement proportionnel au nez d’un célèbre pantin de bois de tous connu. Bécassio à grands coups de mensonges, vit son appendice quelque peu raccourci au point d’en devenir une véritable… brévirostre ! Quelle confiance lui accorder ?
Une année calme
La saison passée ici même, il fallait se méfier. Il fallait déjouer les avances de ces chiens bécassiers, savoir passer au travers des gerbes de plombs. Nos bécasses s’étaient bien amusées. Cette année, pas un chasseur à démasquer avant de lui jouer un tour de démon. Bécassio va s’ennuyer et n’aura pas beaucoup d’anecdotes à enluminer. Cette jeune rousse a pourtant vadrouillé, visité les remises et les places les plus recherchées. Elle s’est même approchée par les chemins tout près du village mais n’as pas vu l’ombre d’un humain ni celle de son chien. Où sont-ils passés ? Bécassio les a cherchés, hélés dans toutes les contrées et n’a eu pour réponse qu’un écho vide. Dix-neuf, dix-huit, dix-sept… Tout en marchant, la belle égrène les pas qui la séparent de la grande clairière où elle se dirige. Elle va participer avec ses compagnons à un séminaire festif sur la situation autour de quelques vers.
« Déconfinez moi ! Oui mais tout de suite. Faites au plus vite. Ou bien je prends la fuite… » C’est Juliette, chasseresse émérite qui entonne cette litanie, prisonnière qu’elle est de tous ces interdits. Trois semaines déjà qu’elle n’a pas pu aller chasser la mordorée avec sa précieuse déesse, Artémis, sa fidèle épagneul Français. Trois semaines à faire les cents pas du salon au jardin et du jardin au salon. Trois semaines, à espérer tous les jours, dans la pénombre crépusculaire, la silhouette furtive d’une mordorée imaginaire… Trois semaines que les autorités ont décrété qu’elle devait rester…comment disent-ils ? Confinée ? Son sang bouille, ses nerfs se nouent de ne pouvoir courir à travers bois avec sa chienne. Ses sens sont en manque d’émotion. L’atmosphère, les odeurs, les couleurs de la forêt d’automne lui manquent. Le son de la campane et celui si caractéristique de l’envol également. Le calibre vingt est huilé et briqué, les munitions triées, la campane astiquée, tout est pourtant prêt.
« Ah ! Elles doivent bien rire, les bécasses, tranquilles au fond de leurs remises » Elle ne peut s’imaginer ces oiseaux libres autrement que moqueurs de son bien mauvais sort. Elle les devine, le soir venu, réunies sous le chêne séculaire au carrefour « des trois sans tête ». Le carrefour « des trois sans tête » ? Non, non ! Point de décapitation, juste un jet de vent qui avait brisé net les cimes de trois grands pins. A coup sûr, elles y sont rassemblées pour un festin sur la piste verte du chemin qui leur offre un véritable terrain d’atterrissage. Une véritable avenue de bienvenue.
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