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Vous me direz : cela ne risque pas de nous arriver avec nos paisibles chiens de chasse !
Certes non, mais l’affaire est intéressante car, si elle consacre le droit à la vie du chien, en l’espèce elle peut avoir des conséquences quant au droit à la vie des autres animaux.
Notre propriétaire de chien va donc contester dans un premier temps devant le tribunal administratif de Paris la décision du préfet refusant de lui rendre son animal et d’ordonner son euthanasie.
Le propriétaire du chien soutenait que l’arrêté préfectoral contesté violait l’article 515-14 du Code Civil qui, je vous le rappelle, définit les animaux comme des êtres vivants doués de sensibilité.
Il invoquait également l’article 3 de la convention européenne pour la protection des animaux de compagnie (convention du 15 novembre 1987 ratifiée par la France le 11 mai 2004) qui interdit de causer inutilement des douleurs, souffrances et angoisses à un animal de compagnie ainsi que l’article 13 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne qui oblige les états membres à tenir compte du bien-être des animaux dans certains domaines du droit national et plus particulièrement en l’espèce dans la mesure où l’arrêté préfectoral relevait du domaine de la Direction des Transports et de la Protection de la Population pour lequel ce texte est applicable.
Notre propriétaire de chien et ses conseils ne manquaient pas d’imagination juridique et la suite prouvera qu’il faut parfois en avoir. Le tribunal administratif de Paris a donné partiellement raison au propriétaire du chien en suspendant l’arrêté préfectoral en ce qu’il ordonnait l’euthanasie du chien mais a rejeté la demande en restitution.
En appel, le Conseil d’Etat, plus haute juridiction administrative en France, a confirmé cette décision par une ordonnance du 1er décembre 2020 qui précise :
« Le droit à la vie du chien n’est pas menacé dès lors que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du Tribunal administratif de Paris a suspendu l’arrêté du Préfet de police en litige en ce qu’il prescrivait, le cas échéant, son euthanasie et il ne résulte pas de l’instruction que ce juge a conduit que son bien-être serait altéré du fait de son placement en fourrière lequel est de surcroît susceptible de déboucher sur le placement de l’animal auprès d’une association, comme le souhaite le requérant lui-même ».
Pour les non juristes, je vulgarise : l’euthanasie porte atteinte au droit à la vie du chien, pas la fourrière.
Et la chasse ?
Il s’agit à ma connaissance de la première décision de justice qui affirme le droit à la vie d’un animal de compagnie.
En tant que propriétaire de chien, je serai assez d’accord avec cette décision même si je m’interroge quant au devenir de certains chiens féroces… mais attention, amis chasseurs, prudence !
Le Conseil d’Etat reprend peu ou prou les arguments juridiques du propriétaire du chien.
Si l’article 3 de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie ne vise par définition que les animaux de compagnie les deux autres textes à savoir l’article 515-14 du Code civil et l’article 13 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne concernent tous les animaux.
Les animaux domestiques et sauvages
Vous voyez maintenant où je veux en venir : un esprit mal intentionné ne pourrait-il pas faire valoir ce droit à la vie pour un animal domestique ou même sauvage ?
A tout le moins, il faut considérer que le droit à la vie d’un animal est devenu un principe qui comporte des exceptions.
Les exceptions par définition ne peuvent être que limitées et justifiées. L’abattage des bovins pour en consommer la viande est certainement justifié, encore que l’on peut se passer de viande !
La destruction des sangliers en surnombre qui occasionnent des dégâts entre certainement dans ce cadre des exceptions au droit à la vie des animaux mais, pour la chasse en général, cela apparaît plus discutable.
Il faudrait certainement pouvoir justifier espèce par espèce de la nécessité de procéder à des prélèvements pour maintenir la biodiversité.
Et les concours sur gibier tiré
Dans ce cadre comment justifier les fields-trials sur gibier tiré naturel ?
Quant au tir sur du gibier lâché, il m’apparaît compromis que ce soit pour étoffer le tableau, pour l’entraînement des chiens ou pour des compétitions.
Mon propos n’est pas d’être défaitiste, bien au contraire. Souhaitons que la chasse qui est un loisir pour beaucoup et pour d’autres un métier à travers l’élevage et le dressage perdure.
Il nous faut toutefois être vigilant et je ne manquerai pas de scruter pour vous l’actualité juridique.
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