Gavisse, centre du village, 8:45 : une vingtaine de maîtres, beaucoup de chasseurs mais pas que, se regroupent autour d’Alain Ehrminger pour le discours de bienvenue et le brief de la journée d’entraînement des chiens d’arrêt. Les chiens sont répartis en trois groupes : un groupe de chiens débutants et deux groupes de chiens « initiés ». Alain s’occupera des « petits », Georges et Michel des « grands ». Départ en voiture jusqu’à la grande plaine où se déroulera la journée, chacun sur l’atelier qu’on lui a désigné pendant le brief.
Maternelle petite section
Du côté des jeunes, Alain explique le déroulement d’une quête pendant la chasse en plaine au petit gibier. Ce que fait le chien, comment il quête, prend les émanations du gibier, marque l’arrêt et le tient en attendant que son maître chasseur le rejoigne puis lève et tire l’oiseau, chien assis à ses pieds car son job à lui est fini. Ça, c’est la théorie. Si un chien d’arrêt arpente le terrain et marque l’arrêt naturellement car c’est dans ses gênes, le garder sage au pied après l’envol de l’oiseau est une autre affaire ! Voilà un des objectifs de ces entraînements. Pour l’heure, les plus jeunes n’ont encore jamais chassé ni parfois jamais encore vu d’oiseau. Il s’agit donc de montrer l’oiseau au chien et voir sa réaction. Ceci dit, il est très rare qu’un chien ne s’y intéresse pas ou qu’il en ait peur quand on le lui montre. Mais ça peut arriver.
C’est parti ! Alain place un pigeon dans une boîte d’envol et la met dans le colza qui fait déjà 20-30 cm de haut. Le chien ne la verra donc pas et c’est à l’odeur qu’il devra trouver l’oiseau. Dans un premier temps, on met le chien en longe. On part de pas trop loin et on approche doucement avec le chien. A l’émanation de l’oiseau, le chien se bloque, tous muscles tendus à quelques dizaines de centimètres de la boîte d’envol. C’est là que commence l’apprentissage : ne pas foncer droit sur la boîte comme un fou mais avancer en coulant doucement vers le gibier pour s’arrêter encore plus près mais sans le faire décoller. Là, il faut retenir le chien, l’apaiser en lui caressant doucement les flancs, éventuellement en le reculant un peu de sa position pour qu’il ne tape pas dans la boîte d’envol. Une fois le chien stabilisé, on déclenche la boîte qui s’ouvre et laisse s’envoler l’oiseau. C’est à ce moment-là que le chien a le réflexe de démarrer derrière pour l’attraper. Mais non. On le retient en le mettant assis et en le maintenant dans cette position, fermement mais gentiment, en le caressant et en le félicitant parce qu’il a trouvé l’oiseau. Pour le deuxième oiseau, on part de plus loin (pas trop pour les jeunes), le maître lâche son chien à contre-vent pour que les émanations du gibier viennent lui chatouiller les narines. Le chien part et cherche. Il sait maintenant ce qu’il cherche et il y va, en zigzags plus ou moins serrés, la truffe dans le vent. En se rapprochant de l’oiseau, l’odeur se fait plus dense… Dans sa course, brusque tour de tête: il a pris l’émanation. Il ralentit puis se bloque : il l’a trouvé ! Le travail du maître recommence : retenir le chien, le calmer, le féliciter. Bonne première journée pour tous les petits qui se sont bien débrouillés, quelle que soit la race : épagneul breton, de Pont-Audemer, français, bleu de Picardie, petit munsterlander, braque du Bourbonnais, setter gordon, etc.
Maternelle grande section
Avec Georges et Michel du côté des chiens confirmés, on travaille sur perdrix, avec ou sans boîte d’envol et sur de plus grandes distances. En sortant de la voiture, eux savent déjà ce qui les attend. Ils sont surexcités. Ils ont envie d’y aller et attendent qu’enfin leur maître leur fasse signe d’y aller. Go ! De beaux lacets bien dans le vent et ça galope jusqu’à ce que… Emanation, blocage, arrêt ! Et ça peut durer longtemps ! Surtout si le maître est très loin. Le chien ne bouge pas, il maintient son arrêt. Son maître arrive à sa hauteur, on fait décoller l’oiseau. Le chien s’assoit. On simule le bruit du tir avec un pistolet à pétards. Le chien est toujours assis. C’est top ! Bon, ça c’est dans le meilleur des cas. A force de travailler avec son chien, on sait s’il a des difficultés dans certaines étapes et on travaille en fonction. Si le chien bourre (fonce sur l’oiseau), par exemple, on part de moins loin, on ralentit sa course pour qu’il reste plus à portée de maître (on marche plus vite aussi !) et on corrige avec la longe ou la laisse pour qu’il garde son arrêt plutôt que d’aller croquer l’oiseau. Dans ce cas, on continue avec la boîte d’envol. Sinon, les perdrix sont endormies et cachées à même le sol sous les feuilles naissantes des cultures ou dans la jachère. On travaille le deuxième et le troisième oiseau en fonction de ce qu’on veut corriger ou perfectionner chez le chien. Ce jour-là, ce sont des épagneuls bretons et français, braque de Weimar, petit munsterlander, drahthaar et setter irlandais qui se sont éclatées en plaines lorraines…
Fin d’ateliers vers 13:30 puis pique-nique entre tous les participants pour clôturer une belle journée sportive. Outre les binômes maître-chien qui profitent de ces journées d’entraînement, le territoire de chasse s’est enrichi d’une cinquantaine d’oiseaux qui y ont été lâchés et qui y resteront sûrement car on y trouve des cultures, des haies et des agrainoirs ! A des fins statistiques cette fois-ci, les oiseaux ont même été bagués juste avant d’être utilisés pour le travail des chiens.
Deux autres journées ont été programmées jusqu’au 15 avril puis à nouveau de mi-juillet à fin août (entre-temps, pas d’entraînement pour ne pas risquer que les chiens dérangent les nichées du printemps), juste avant la réouverture de la saison de chasse avec, du coup, un chien en forme et opérationnel. Plutôt sympa comme devoirs de vacances, non ?